« Mes frères, mes sœurs, mes amis, mes fidèles,
Notre Eglise de la Nature Humaine est à un tournant de son histoire ! Quand je l’ai fondée il y a 2 ans jour pour jour, après la Nuit de la Révélation, cette fameuse nuit que j’ai passée ici même, au pied de cet arbre que vous contemplez tous derrière moi, j’avais la certitude que mon message – que dis-je ? NOTRE message ! – allait changer le monde. Je ne me suis pas trompé, soyez-en sûrs !
Vous le savez, l’homme est connecté à Gaïa, notre bonne vieille Terre… Elle nous accueille, comme tous les êtres vivants, et nous y vivons, nous y mourrons, nous nous y reproduisons… Nous y sommes l’égal des arbres, des animaux, des insectes, de l’eau, du feu, du ciel… Mais les humains se comportent comme un virus sur cette planète ! Ils la tuent à petit feu en ne comprenant pas qu’ils ne sont pas supérieurs à elle mais au contraire, qu’ils représentent un composant minuscule de cette grande Création. Les humains sont une bactérie à l’échelle de Gaïa mais ils se prennent pour son cœur et son cerveau ! Cette arrogance sera mortelle si nous n’alertons pas le monde entier…
Car nous sommes, que dis-je… VOUS ÊTES les messagers ! A chacun sa croix, comme dirait l’autre… mais la nôtre est d’une importance capitale. Heureusement pour tous nos frères humains, j’ai pris conscience de cette mission primordiale il y a 2 ans, ici même… Vous le savez tous, à cette époque, j’étais égaré… Une brebis galeuse aux yeux de tous… Je me perdais dans l’errance spirituelle de celui qui n’a pas trouvé de sens à sa vie ni même de sens au monde qui l’entoure. Je n’avais pas établi la connexion avec ce que je suis fondamentalement et que j’ai découvert au pied de cet arbre : un Pollen ! Je suis un Pollen, vous êtes des Pollens, et les autres êtres humains ne savent pas encore qu’ils sont des Pollens ! Mais ils le sauront bientôt, n’en doutez pas ! Tous adopteront le dogme Pollinique de l’Eglise de la Nature Humaine que je vous ai enseigné…
Car oui, je vous le dis ! Notre rôle d’humains est de donner de l’amour à Gaïa, de fertiliser la Création aussi sûrement que les abeilles butinent la flore ! Nous sommes des vivants au service du Vivant, un petit rouage du Grand Tout auquel nous appartenons ! Mais un rouage, aussi petit soit-il, reste essentiel au bon fonctionnement d’une machine ! Certaines pièces ont des fonctions stratégiques et c’est vous, mes amis, mes fidèles, qui jouerez ce rôle ! Vous êtes les Pollens Matriciels ! Ceux qui savent, ceux qui ont la pleine conscience de leur mission !
Et n’écoutez pas tous ceux qui, prisonniers de leur aveuglement, nous prendront pour des fous… Tous les grands hommes ont commencé par avoir tort : Copernic, Galilée, De Gaulle… ou moi, aujourd’hui… N’accordez pas d’importance au jugement de ceux qui croient en d’autres formes de divinités… Car le Dieu qu’on nous sert depuis la nuit des temps n’a pas de barbe ni de visage humain… il n’est pas entouré d’anges… Il n’a pas non plus envoyé son fils sur Terre, ce ne sont que des contes pour enfants… Aucun Dieu n’a même clairement pris la parole pour réclamer des curés, des imams ou des rabbins !! Où est la preuve de l’existence de ce Dieu antique imaginé dans le désert ? Il n’y en a pas et il n’y en aura jamais, je vous le dis ! La seule preuve de l’existence de Dieu, ce sont vos yeux, ici même, qui vous la révèlent ! Regardez cette nature ! Cette herbe, ces arbres ! Dieu est partout ! En vous et autour de vous ! Il nous cerne, il nous constitue, il est en toutes choses et, à notre humble position, nous sommes Dieu également ! Et c’est là que j’ai besoin de vous…
Votre rôle, mes amis, mes fidèles, est de répandre cette parole… mais aussi votre semence, messieurs ! Mais oui, mais oui ! Votre semence ! La vie tapie dans vos bourses, ces milliards de micro-existences qui font autant partie de Gaïa que les têtards ou le plancton, ne doit pas rester prisonnière de vos burnes ou se contenter d’une balade mortelle dans la matrice de vos femmes ! Vous devez semer vos graines humaines dans les champs, sur les fleurs, dans les rues et les sentiers ! Que la vie engendre la vie, que les spermatozoïdes nourrissent les vers de terre, que les roubignolles payent leur impôt à la collectivité de Gaïa ! Le pollen des fleurs et des arbres navigue au gré du vent, il fertilise la terre sans préjugés ni arrière-pensées… il ne se censure pas, il ne connaît pas les frontières, il s’insinue partout où il peut voler… Faites-en de même, mes amis, mes fidèles ! Ejaculez sur Gaïa, fécondez notre terre nourricière et faites-vous aider de vos femmes !
Mais oui, mesdames… Vous avez le pouvoir de donner la vie, mes sœurs, mais vous avez aussi la liberté, que dis-je… LE DEVOIR de partager ce don en rendant à Gaïa ce qui appartient à Gaïa… Alors, agitez la tige de vos frères et aidez-les à répandre le sperme divin ! Car il est divin, je vous le dis ! Sur l’écorce des arbres, dans les champs de blé, dans la nourriture des poules ou dans les étangs poissonneux, l’humanité expulsée par les hommes sur toutes les terres du monde formera un compost qui perpétuera la Création et contribuera au miracle de la vie !
Allez-y, ne soyez pas aussi égoïstes que vos frères humains qui n’ont pas encore pris la mesure de leur mission sur cette terre ! Exhibez vos fiers testicules, fermez les yeux et pensez fort à Gaïa ! Rendez-lui l’hommage qu’elle attend… Je vous vois hésitant, Benjamin et Laurent… vous aussi, Charly et Semi… ou toi encore, mon fidèle Michael… Oh, et ne soyez pas si réservés, Julien et Olivier… Vous tous, mes amis qui m’accompagnez depuis si longtemps pour propager notre message et nos fertilisants naturels, demandez à vos voisines de s’emparer de vos trompettes de vie pour devenir les Pollens Matriciels que vous êtes au fond de vous-mêmes ! Donnez votre écot à l’Eglise de la Nature Humaine, c’est la seule et unique contribution que je vous demanderai ! L’argent ne m’intéresse pas car la richesse est dans vos bourses ! Vos bourses, c’est la vie !
C’est bien, mes amis… Je vois que vous pensez fort à Gaïa… Moi-même, je vais contribuer ce soir à notre action collective pour que cet anniversaire de la Nuit de la Révélation soit une date historique… Je vais aller nourrir de ma semence cet arbre qui a abrité mon désarroi et assisté à ma renaissance. Je vais l’arroser de mon énergie vitale, lui donner l’amour que Gaïa exige de toutes ses créatures… Fusionner la faune et la flore, mélanger les vies et perpétuer le cycle de la Création… Je me mets nu devant vous, sans pudeur, car je connais l’intérêt supérieur de notre mission face à l’ineptie de nos scrupules humains ! Je m’adresse à toi, grand Chêne, et te remercie d’accepter le don de mon Pollen ! Je vais te polliniser dans la joie, avec l’aide de ma sœur – euh… tiens, toi ! Viens me rejoindre… – et te remercier de tout mon corps pour tous ces beaux glands que tu répands autour de toi ! Je te donne mon… vas-y, ma soeur, accélère… je te donne mon amour et te rends hommage, toi l’arbre, Dieu parmi les Dieux ! Nous sommes tous des… super, continue, je sens que Gaïa va bientôt être contente… nous sommes tous des Dieux, JE SUIS DIEUUUUUU !!!!!!!
…rhhHHHÂÂÂâââ… »
***
Jean-Bernard Pommier avait pris l’habitude d’arpenter la campagne tôt le matin, cherchant dans le calme de l’aube l’inspiration qui lui permettrait de balayer l’angoisse de la page blanche. Il ne parvenait pas à trouver une entrée en matière satisfaisante pour le tome 4 de sa saga rurale « Le Vent Dans les Algues Vertes ». Empruntant le chemin de terre battue qui traversait les champs de sa campagne natale, il laissait flotter ses pensées, autorisant les phrases qui naissaient en lui à prendre toutes les directions possibles. « Un artisan du Verbe ne se censure pas, sinon c’est la mort de la licence poétique » se répétait souvent Jean-Bernard Pommier. Alors que les mots s’affolaient dans sa tête, le poète-romancier leva le nez, quittant ses pieds des yeux. Il aperçut devant lui, à quelques dizaines de mètres, ce qui ressemblait à des corps. Approchant des lieux, inquiet à l’idée d’une découverte macabre, il comprit qu’il ne s’était pas trompé : devant lui gisaient une dizaine d’hommes, allongés dans l’herbe humide de rosée et… d’autre chose, il n’aurait su le décrire avec précision…
Ils dormaient du sommeil du juste, le pantalon aux chevilles et les couilles à l’air. Trois femmes, également assoupies, les accompagnaient, recroquevillées dans leur robe pour se protéger de la fraîcheur du matin. Un peu à l’écart, au pied du grand chêne dominant la région, un homme hirsute, vêtu d’une toge blanche remontée jusqu’à la taille, ronflait la bouche ouverte et le sexe au vent.
A la vue de cette scène qu’il attribuait, non sans clairvoyance, à la légitime récupération consécutive à une nuit décomplexée, il sut qu’il tenait la première phrase de son prochain ouvrage : « Au pied d’un grand chêne reposaient de gros glands ».
La Réalité ?
Nu, il fait l’amour à un arbre tout en hurlant qu’il est Dieu
Et en cadeau, la vidéo du fait divers
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